Budget militaire : les économies de Michel Sapin

Publié le par Mathieu Lefort

Budget militaire : les économies de Michel Sapin

La rumeur s'était propagée depuis l'annonce de Xavier Bertrand sur Europe 1, le 11 mai dernier, le ministre des Finances et des comptes publics, Michel Sapin, préparerait une coupe budgétaire dans les crédits alloués à la Défense alors que ce même budget était selon les paroles du chef de l'Etat «sanctuarisé».

Selon les informations du Point, cette coupe est belle et bien prévue : «Michel Sapin a enfin fait connaître en haut lieu, verbalement à ce stade, qu'il souhaite une remise en cause des engagements budgétaires de la loi de programmation militaire votée par le Parlement en décembre 2013 [...] Michel Sapin a réclamé une baisse de 1 à 2 milliards d'euros sur les trois prochaines annuités budgétaires, soit un total compris en 3 et 6 milliards d'euros de 2015 à 2017»1.

C'est donc une très mauvaise nouvelle, aussi bien pour les citoyens -qui voient leur armée de plus en plus affaiblie et démunie- que pour les industriels -qui perdent de l'argent et surtout des savoirs-faire-, les politiques -qui voient leur champ d'action politique diminuer, puisque oui, en effet, la puissance militaire fait partie du répertoire politique- et bien évidemment les militaires qui doivent supporter à eux-seuls les réductions budgétaires et les caprices de Bercy.

Le budget de la Défense, fixé à 31,4 milliards pour 2013, est déjà amputé par la non-prise en compte de l'inflation annuelle et les multiples opérations extérieures dans lesquelles sont engagées nos troupes ne font que réduire les crédits de fonctionnement et d'équipement -déjà peu importants- car l'armée se retrouve à payer ces OPEX (1,2 milliard en 2013). Si cela ne suffisait pas, le budget est soumis au caractère aléatoire des «ressources exceptionnelles» (vente de caserne militaire par ex.) qui ne viendront sans-doute jamais.

Au lieu de s'attaquer à l'Education nationale, aux frais de santé exorbitants ou encore au poids du fonctionnariat sur le budget de l'Etat, on s'obstine à diminuer nos crédits de Défense. Et aucune piste n'est engagée pour retrouver la croissance en s'appuyant sur des politiques maritimes potentiellement riches en terme de croissance pour le pays.. Rappelons, entre autre, que les fonds sous-marins constituent un potentiel de ressources minérales et biologiques considérables : terres rares, nodules polymétalliques, biomasse.. ressources au cœur des biotechnologies et de la recherche médicale. Or la France possède ici une opportunité hors-du-commun car détentrice du deuxième domaine maritime au monde. Sans doute un domaine trop exotique pour être sérieux et envisagé ?

En attendant, on continue à taper sur notre armée et sur nos programmes d'armements. Il est vrai, nos soldats n'ont pas besoin de renouveler leur flotte de ravitailleurs âgée de plus de 50 ans, ils n'ont pas besoin de remplacer leurs VAB usés jusqu'à la moelle, ils n'ont pas besoin de remorqueurs dans les ports, ils n'ont pas besoin de drones, ni même de munitions ! Cela tombe bien, les commandes de munitions sont aux minimum, il faut compter tout au plus 200 missiles SCALP naval pour nos futurs FREMM et Barracuda et moins d'une centaine de torpille lourde de type F21. En conséquence, les exercices de tirs se font de plus en rares. La frégate Dupleix a récemment tiré ses derniers missiles MM38 lors d'un exercice, ce qui ne s'était pas produit depuis 2006 (!) ...

Enfin, ne prenons pas en compte le fait que notre Royale ne possède plus que dix bâtiments de guerre de premier rang à l'heure où j'écris ces lignes et que notre ZEE n'est surveillée que par trois ou quatre bâtiments tout au plus..

Ces coupes budgétaires sont peut être celles de trop. Il paraîtrait que les chefs d'Etat-majors sont prêts à démissionner s'il le faut pour montrer leur mécontentement. Envisager une pareille chose pour le ministre de la Défense n'est pas à exclure. Les principaux industriels ont adressé une lettre au Président de la République et la colère monte dans les rangs des simples soldats, on peut les comprendre, puisque leurs familles sont touchées -cerise sur le gâteau- par le fameux problème du logiciel de paiement Louvois.

Monsieur le Président de la République, outre le fait que vous avez promis de sanctuariser le budget de la Défense, vous êtes, selon l'article 5 de la Constitution, garant de l'indépendance nationale. Sans un budget de Défense équivalent au minimum à 2% du PIB, point d'indépendance pour la France!2

 

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R
Superbe article!
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S
Le Cema a fait savoir que les seules marges de manoeuvres restantes pour réduire le budget de la défense étaient sur les rémunérations. Cela commence puisque, du aux problémes louvois, le paiement d'une indemnité est stoppé "jusqu'à nouvel ordre":http://secretdefiance.com/arret-du-paiement-des-isc-commentaires/
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